Quatre pattes ou pas quatre pattes ?

 

Comment s’y retrouver dans tous les discours contradictoires sur le 4 pattes ? 

  • « Il est très important que le bébé fasse du quatre pattes avant de marcher »,
  • « Il n’a pas fait de quatre pattes et il va très bien »,
  • « Ne pas faire de 4 pattes n’est pas gênant à partir du moment où le bébé se déplace »
  • « Je pense qu’il ne passera jamais par le 4 pattes malgré votre rééducation »

 

Construction de la mobilité du bébé.

Comme tout être vivant, le bébé est un être en mouvement.

Grâce à cette mobilité, il va apprendre à connaître son corps et découvrir le plaisir de bouger.

Il peut se déplacer au sol bien avant de savoir marcher, ce qui lui permet une première analyse du monde qui l’entoure.

Si la marche ouvre un espace de découvertes plus large à l’enfant, notamment pour se déplacer à l’extérieur, il profite, avant cela, d’une multitude d’expériences, accompagnées d’essais, d’erreurs, qui vont le construire sur tous les plans (Référence aux 1000 1ers jours). Le quatre pattes en fait partie : c’est une étape au milieu de toutes les autres, chacune ayant son importance dans le développement du bébé.

Le bébé doit d’abord être à l’aise sur le dos, sur les côtés et sur le ventre, afin de pouvoir :

  • Se retourner du dos au ventre, du ventre au dos
  • Pivoter sur le ventre, à droite et à gauche
  • Ramper en avant
  • S’installer et maintenir la position 4 pattes avant de se déplacer
  • Se mettre assis et en sortir
  • Se mettre debout et en sortir
  • Acquérir tous les déplacements debout avec appuis
  • Marcher seul

 

Quels sont les bénéfices du déplacement à 4 pattes ?

  • Poursuite du travail de tonification déjà entamé lors des étapes précédentes. Ce travail musculaire est particulièrement important au niveau des ceinture scapulaire et pelvienne : stabilisation des épaules et du bassin mais aussi gainage du tronc.
  • Travail de coaptation des hanches
  • Travail de l’extension des poignets, de l’ouverture des doigts et contact de la paume de la main avec les expériences sensorielles qui en découlent.
  • Déjà très riche lors du ramper vers l’avant, le travail de coordination se poursuit : entre la droite et la gauche, entre le haut et le bas du corps et la coordination croisée qui servira plus tard pour marcher et courir mais aussi pour s’habiller, pour manipuler…
  • Les réactions parachutes antérieures sont largement stimulées grâce au repousser sur les membres supérieurs associé au redressement de la tête.
  • Le tronc n’étant plus en contact avec le sol, ce déplacement sur 4 appuis, sollicite l’équilibre.
  • Le 4 pattes fait le lien entre l’horizontalité et la verticalité sur le plan de la motricité globale mais aussi sur le plan de l’oculo-motricité dans la mesure où il y a un jonglage visuel permanent entre le plan vertical et horizontal.

 

Tous ces arguments permettent de mesurer l’importance du passage par le déplacement à 4 pattes.

La qualité des déplacements contribue grandement à la richesse du développement global. De nombreuses études scientifiques mettent en avant l’importance d’observer dès la naissance (et même in-utero) de la variabilité, de la fluidité et de la complexité dans les mouvements généraux du bébé. Ces critères, nous, kinés Formations Forestier, sommes convaincus qu’il faut tout faire pour les obtenir aussi lorsque le bébé bouge et se déplace.  Chaque nouvelle étape doit aller vers plus de complexité tout en conservant la fluidité et variabilité.

 

Que dit la littérature sur les conséquences de ne pas s’être déplacé à 4 pattes ?

Il n’y a pas d’étude qui prouve que le fait de ne pas passer par l’étape du quatre pattes aurait des conséquences. Cependant on peut s’appuyer sur ces quelques références scientifiques :

  • Emmi Pikler, pédiatre à l’origine du concept de motricité libre avait constaté dans une étude sur l’observation de 750 bébés dans un orphelinat qu’ils étaient tous passés par le 4 pattes. (1)
  • Marianne Barbu-Roth chercheuse en neurosciences, a montré que le bébé qui vient de naître peut se déplacer à l’aide de ses membres supérieurs et de ses membres inférieurs lorsqu’il est placé sur un support avec des roulettes et utilise la stimulation très précoce du 4 pattes pour soutenir le développement moteur ultérieur (2)(3).
  • Une étude de 2021 rapporte une proportion moins importante de déplacements à 4 pattes chez les enfants présentant un Trouble du Spectre Autistique que dans la population générale. Attention, cela ne veut bien sûr pas dire que le bébé qui ne passe pas par le 4 pattes présente un TSA ! Mais plutôt qu’une vigilance est de mise lorsque le bébé ne passe pas par le 4 pattes (4).

 

(1) E. Pikler. Se mouvoir en liberté dès le premier âge. Presse universitaire de France; 1970, 186p.

(2) M Barbu-Rot, M-ViDumuids-Vernet, V Forma, J Provasi, D Ian Anderson, E Hinnekens et al. Stimulating the motor development of very premature infants: effects of early crawling training on a mini-skateboard. Frontiers in pédiatrics. June 2023.

(3) QI L. Xiong, Xiao Y. Wu, Yuan Liu, Cong X. Zhang and Wen S. Hou. Measurement and Analysis of Human Infant Crawling for Rehabilitation:  A Narrative Review. Frontiers in neurology. Oct 2021.

(4) N Lavenne-Collot, N Jallot, J Maguet, C Degrez, M Botbol, M Grandgeorge . Early Motor Skills in Children With Autism Spectrum Disorders Are Marked by Less Frequent Hand and Knees Crawling. Hal.science. Sept 21.

 

Quels sont les profils des bébés qui risquent de ne pas passer par le 4 pattes ?

  • Les bébés qui ne sont pas à l’aise à plat ventre
  • Les bébés très en tension sur le plan postérieur
  • Les bébés hypotoniques
  • Les bébés hyperlaxes
  • Les bébés présentant des hypertonies
  • Les bébés présentant une faiblesse de la ceinture scapulaire, du tronc ou de la ceinture pelvienne.

 

Les bébés en situation de handicap comme ceux qui présentent une paralysie cérébrale ou une maladie génétique pourront parfois prendre des chemins moins complexes pour contourner les difficultés auxquelles ils sont confrontés. Permettons-leur, à travers nos rééducations de passer aussi par cette étape du 4 pattes pour leur faire bénéficier d’expériences motrices variées et complexes qui enrichira leur mobilité, leurs expériences, leurs explorations et leur analyse de l’environnement, leur confiance en eux… Cela n’est pas toujours possible mais dans la majorité des cas ça l’est, même si cela prend du temps, demande de la persévérance au bébé aux parents et au rééducateur !

En conclusion, marcher à quatre pattes n’est pas « obligatoire » pour apprendre à marcher, mais c’est une étape riche, complexe et très intéressante pour le bébé. C’est l’intermédiaire entre la mobilité à l’horizontale et la mobilité dans la verticalité. Elle tonifie les muscles des membres supérieurs, des membres inférieurs et du tronc, stimule l’équilibre, consolide les coordinations, travaille les réactions parachutes, et la stabilité des hanches et des épaules….

 

Chez Formations Forestier, nous recherchons une motricité complexe, variable, fluide, dans les 3 plans de l’espace comme dans les mouvements généraux, nous sommes convaincus que la rééducation doit permettre à chaque bébé de bouger au mieux en passant par les différentes étapes du développement : cela l’aidera non seulement pour l’acquisition de la marche mais aussi pour son développement global !